En mémoire de l’Association des Surintendantes d’Usines
Il est des mots que l’on redoute d’avoir à prononcer. Il est des deuils qui ne devraient jamais exister. Aujourd’hui, nous devons pourtant regarder en face l’impensable : la disparition programmée, inéluctable, de l’Association des Surintendantes d’Usines.
Fondée dans l’élan d’après-guerre, née des cendres de la Première Guerre mondiale, cette association était une réponse humaine, sociale, éclairée, à un monde brisé. Elle a incarné, pendant plus d’un siècle, l’exigence de justice, le respect du travail, l’encadrement bienveillant, l’émancipation des femmes dans le monde ouvrier, et la dignité dans l’accompagnement social.
Aujourd’hui, cette flamme vacille. Non pas parce que le monde aurait cessé d’avoir besoin de ces valeurs, mais parce qu’un homme, un seul, aura suffi à précipiter l’effondrement.
Depuis près de 15 ans, une gouvernance a présidé notre institution. Le mot dirigé serait ici une insulte au mot engagement. Sous son autorité, guidée par les conseils d’un individu aussi douteux qu’incompétent sous ses 3 cabinets conseil, l’association a été méthodiquement dépouillée de sa rigueur, de sa vision, de ses principes, et de sa fierté.
Sous cette présidence, les directions se sont succédé dans un turn-over incessant. Recrutées par le président lui-même, elles ont été, sans exception, discréditées à leur départ, qualifiées d’incompétentes, systématiquement affaiblies. Ce cycle de déstabilisation a miné la confiance interne, brisé les repères, et accéléré la fuite des compétences.
Depuis quelques mois, la direction de transition n’a pas été là pour bâtir, mais pour assurer le rôle de fossoyeur de l’ETSUP.
Et ce délitement s’est accompagné de méthodes indignes :
Nous ne comptons plus les violences psychologiques, les départs des plus anciens salariés, les tentatives d’intimidation, le dénigrement systématique des élus du personnel, les jeux de pouvoir allant jusqu’à l’effacement de boîtes mail professionnelles, ou encore cette scène surréaliste : se présenter au tribunal sous une fausse identité, usurpant celle du délégué syndical.
Mais le naufrage ne s’arrête pas là.
La vente du bâtiment historique de Montsouris avait rapporté plusieurs millions d’euros. Cet argent devait permettre de créer une nouvelle école à Arcueil, un projet porteur d’avenir. Depuis près de deux ans, le chantier d’Arcueil est à l’abandon, un tas de béton vide, sans affectation, sans avenir. L’argent a été dilapidé. La promesse trahie.
L’ETSUP est à l’image de ce chantier : un champ de ruines là où il y avait transmission, espoir et savoir.
Ce n’est pas seulement une école qui ferme. C’est une mémoire, un engagement, une promesse faite aux plus vulnérables.
Faut-il donc si peu de temps, si peu d’hommes, pour effacer un siècle de dévouement ? Faut-il si peu de vigilance pour que l’ambition personnelle se mue en trahison collective ?
Nous ne pouvons pas rester silencieux. Nous ne pouvons pas tourner la page sans nommer les responsabilités, sans pleurer les conséquences, sans dire l’immense perte pour nos étudiants, nos enseignants, nos partenaires, et pour tous ceux que cette école formait pour servir la société. Il faudra que justice soit rendue !
Ce plaidoyer n’est pas seulement un cri de colère. C’est un acte de mémoire. C’est un hommage aux femmes qui, dès 1917, ont refusé l’abandon. C’est un dernier geste de loyauté envers les principes qui fondaient notre action.
L’école sera vraisemblablement déclarée en liquidation judiciaire le 3 juillet 2025, sauf si un repreneur – total ou partiel – se manifeste. Le compte à rebours a commencé.
Et aujourd’hui, nous lançons un appel.
À toutes celles et ceux qui croient encore au bien commun.
À celles et ceux qui se battent pour l’égalité, pour la justice sociale, pour l’éducation, pour les droits des femmes, pour l’engagement citoyen.
À toutes les forces vives qui refusent la résignation.
Rejoignez-nous. Soutenez cette cause.
Empêchons ensemble qu’un siècle d’histoire sociale ne soit jeté aux oubliettes par l’irresponsabilité de quelques-uns.
Qu’on le sache : ce qui meurt aujourd’hui, ce n’est pas une association – c’est une promesse sociale trahie.
Et cela, nous ne l’oublierons jamais.