Extrême droite et écoles de commerce !?

ESCP avec Zemmour ?

Dans les grandes écoles comme dans la société française, l’extrême droite progresse insidieusement. C’est ainsi que, fait rare, un invité-surprise est venu débattre avec les élèves de l’École Supérieure de Commerce de Paris dans l’amphithéâtre Vital Roux de l’établissement. « Tribune », une association d’étudiants fondée par Jean-Pierre Raffarin en 1973, y organise régulièrement des rencontres entre des décideurs politiques ou économiques et les futurs cadres dirigeant que sont les élèves de l’école. Mais ceux-ci ne sont jamais dissimulés de la sorte. Ou, tout du moins, pas avant que cette association ne décide de cacher l’identité de son invité pour la première fois de l’histoire de l’école. Quelle ne fut donc pas la surprise des élèves et du personnel de l’école lorsque ceux-ci apprirent que l’invité n’était autre qu’Éric Zemmour, venu présenter son programme présidentiel au sein de l’établissement.

Le climat de l’intervention du candidat à la présidentielle a vite tourné à l’orage.
La question LGBT+, au travers de l’association ESCAPE est très présente au sein de la communauté ESCP. Cette association qui regroupe plus de 200 membres organise des débats et des actions de sensibilisation à la cause LGBT+. Le propos de M. Zemmour contre les femmes et les communautés LGBT+ ne pouvait que révolter les élèves et le personnel.
Malgré la tentative de camoufler l’événement, la nouvelle a été rendue publique quelques heures avant sa tenue. Faute d’avoir pu s’inscrire, les étudiants n’étant pas dans la confidence ne pouvaient rentrer dans un amphithéâtre où le polémiste pensait pouvoir dérouler sans heurt sa rhétorique habituelle. Un mode d’action sournois, qui de l’extérieur a pu donner l’impression que toute la salle et in extenso tout l’ESCP était acquise aux propos du polémiste. Le candidat est en effet arrivé sous un tonnerre d’applaudissements, tandis que des chants à son honneur ont accompagné sa prise de parole.
À l’intérieur, la réalité était pourtant toute autre. Les propos d’Éric Zemmour, retransmis en direct, ont immédiatement choqués. Mais cela n’a pu se voir ni s’entendre puisque l’accès à la salle était cadenassé par la sécurité. Personne d’autre que les sympathisants du polémiste n’était invité à afficher ses couleurs : un drapeau arc-en-ciel a par exemple été confisqué par la sécurité au cours de la conférence. Pas exactement l’idée que l’on se fait de la liberté d’expression dans une grande école française.
Pour comprendre le pourquoi d’un tel faux pas, il faut en effet remonter quelques années en arrière. L’association « Tribune » avait alors tenté d’inviter M. Florian Philippot à venir débattre entre les murs de l’école de commerce parisienne. Cette invitation publique avait suscité la mobilisation d’élèves pourtant peu enclins à ce genre de pratiques militantes, ce qui eut pour conséquence de voir le débat finalement déprogrammé peu de temps avant sa tenue. C’est ainsi qu’il a par la suite été décidé de passer sous silence l’identité de cet intervenants trop sulfureux. Pas exactement les leçons qu’il eut été utile de tirer de ce malheureux précédent.
L’événement n’a bien sûr pas manqué de choquer les étudiants de l’école. En moins de 48h, soit le week-end ayant suivi, ceux-ci se sont mobilisés pour écrire une tribune signée par plus de 700 élèves et anciens élèves qui fut diffusée dans le journal « Libération » dès le lundi matin. Pour la communauté ESCP, une école qui préserve sa réputation en évitant tout fait politique, cette action n’a rien d’habituel.
Cet événement a suffisamment choqué les étudiants pour qu’en moins de 48h, en un week-end, ils se mobilisent pour écrire une tribune, la fasse signer par plus de 700 élèves et anciens élèves et le publient dans « Libération » (ici) le lundi matin suivant. Il faut signaler que pour la communauté ESCP c’est assez inhabituel car l’école ne fait pas de politique et elle ne met pas sur la place publique ses divergences pour préserver sa réputation.
Suite à cette soirée, le Directeur Général a décidé que les conférences ne seraient plus retransmises en direct et une réunion avec la communauté ESCP serait organisé début janvier 2021 pour échanger autour cet événement.
Ce qui est inquiétant, pour les étudiants et les salariés, c’est que les idées défendues par M. Zemmour ont un écho important au sein de l’ESCP puisque l’amphithéâtre était plein (250 personnes) et que la direction a géré les choses en se cachant et sans assumer ses responsabilités. Pour une école de commerce et de management formant les futurs dirigeants, l’exemple donné est catastrophique. Malheureusement cette façon de faire est bien connue des représentants du personnel.

Ce qui est inquiétant pour le SNPEFP-CGT, c’est que même au sein d’une institution européenne — où se côtoient de nombreuses nationalités des 5 continents qui défendent la mondialisation libérale et une certaine forme d’humanisme — les idées racistes, lgbtophobes, misogynes et réactionnaires trouve un écho non négligeable. Laisser les dirigeants de demain s’appuyer sur ces valeurs pour diriger leur entreprise, c’est garantir de futures attaques très dures envers le droit social et les travailleurs au cours des décennies à venir.

Voir aussi : cgt et extrême droite

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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