Modèles vivants : Vers la constitution d’un syndicat de métier

Métiers précaires indéfendables par le syndicalisme d’entreprise : le cas des modèles vivants

 

Le syndicalisme d’entreprise ne fonctionne pas avec les métiers précaires. À partir de ce constat, le syndicat CGT de l’enseignement et de la formation privée accueille un collectif des modèles vivants pour permettre à ceux-ci de créer leur propre syndicat de métier.

Ce métier existe depuis 400 ans mais ne s’apprend que par la pratique, sans diplôme ou certification. Les modèles vivants sont multi-employeurs avec autant de contrats différents à la clef. Ils peinent à se compter, entre ceux qui en ont fait leur activité principale et ceux pour qui c’est un revenu d’appoint. En Île-de-France, ils seraient autour de 200 (entre les écoles d’arts privés, les beaux-arts et les ateliers municipaux) à subir les conséquences du covid-19 de plein fouet. Il y a d’abord eu les cours planifiés mais non payés puis les pressions exercées dans certaines écoles pour obtenir l’accord des modèles afin que les séances de pose soient enregistrées. Refuser et c’est l’assurance de ne plus travailler pour l’école.

Il n’en fallait pas plus pour lancer le collectif CGT des modèles vivants, pour le moment « accueilli » par le syndicat CGT de l’enseignement et de la formation privée. « Avec le syndicat, nous couvrons environ la moitié du champ d’activités des modèles vivants. Le message a clairement été passé aux autres syndicats concernés par notre initiative pour qu’ils puissent s’impliquer dans une action qui ne vise pas à marcher sur leurs plates-bandes. L’ambition du collectif est de créer un syndicat des modèles vivants qui se raccrocherait à la fédération de l’éducation, de la recherche et de la culture qui couvre 90 % de l’activité », explique Christine Fourage, secrétaire générale du SNPEFP-CGT, qui reconnaît que le syndicalisme d’entreprise ne fonctionne pas avec les précaires, à l’image de certains professeurs d’arts plastiques qui considèrent que les modèles qui refusent le principe de la pose filmée « ne coopèrent pas ».

L’approche corporatiste paraît comme la plus à même de défendre des modèles qui considèrent que leur droit à l’image n’est pas garanti par les avenants proposés par les écoles pour les filmer pendant les poses et qui ne comprennent pas pourquoi la multi-diffusion de leur travail ne s’accompagnerait pas de droits d’auteurs. « La parole des modèles n’a pas été entendue dans les écoles », souligne une représentante du collectif qui ne manque pas d’interroger la valeur pédagogique d’une pose filmée en 2D : « nous sommes devenus des marchandises que l’on peut copier-coller ». Début octobre, l’école Pennighen (qui fait travailler autour de trente modèles) a ouvert Pennighen.TV pour proposer du bi-modal à ses étudiants. Tous les cours sont filmés et, une semaine sur deux, la moitié des étudiants les suit à distance. La direction affirme avoir lancé le projet au printemps pour faire face au covid-19 mais le collectif assure que la réflexion était antérieure et que la frontière entre du bi-modal et la multi-diffusion est bien mince …

Par Rodolphe HELDERLÉ, le 27 octobre 2020 in Miroir social.

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